Lumineux-Champollion
  Lumineux-Champollion

L’ÉGYPTE EN VISITE À

    TURIN.   (1ère Partie), 

 

juin 1824 / octobre 1826.

 

Turin, Rome, Florence, Livourne, Bologne, Venise, Naples, Pompéi.



  

-Début 1824.

Mon héros est à Vif dans la maison familiale. Il apprend un nouveau métier… « papa », avec sa petite Zoraïde née le 1er mars dernier. Il farniente un peu aussi, choyé par son épouse Rosine, ses remuants neveux et par leur maman, la tendre Zoé qui l’adore. Il profite de ces moments de calme si rares pour peaufiner son grand-œuvre au grand air. Mais cela ne saurait durer. « Séghir », comme Zoé aime à l’appeler, est « Séghir » !… Il a la fureur de l’Égypte… Il ne se repose que d’un œil… L’autre, celui qu’il a hérité d’Horus, veille sur son vieux monde.

Une invitation arrive alors. Monsieur Jean-François Champollion le Jeune est invité à se rendre dans la ville de Turin afin d’y établir un catalogue raisonné d’une collection d’antiquités égyptiennes, témoins d’un monde sommeillant et que la dite ville vient d’acquérir de Monsieur le Consul de France Drovetti.

 

(La voir, enfin… Elle vient pour moi, elle m’appelle. Alors, je marche vers elle, J’ai le cœur qui bat, je vais voir cette Mère que je ne connais pas.)

 

Qu’on me donne mes bottes et mon manteau ! Andiamo! Direction Chambéry, puis Torino !

Si, le franchissement des Alpes fut pour certains, une belle occasion de se faire remarquer, je pense notamment à Hannibal accompagné de ses éléphants, ou encore au général Buonaparte sur son cheval blanc cabré (enfin, d’après la propagande de l’époque), mon héros, lui, a le passage de col disons… modeste. Il revêt humblement sa panoplie de découvreur d’antiquités, à savoir : une calèche, un change, des plumes d’oie, de l’encre, du papier, et, une chose dont il ne se sépare jamais, son génie.

Tout commencera par une histoire de « Comte »… Le premier, dauphinois, le Comte Balbo, est le premier à l’accueillir en ce 8 juin. C’est lui qui avait proposé à Jean-François une chaire d’histoire ici à Turin et de prendre également la nationalité italienne… (Ces deux propositions l’avaient nettement perturbé.) Le lendemain, autre Comte, Costa, Lodovico de son prénom, qui restera l’un de ses plus grands soutiens.

Honneur réciproque que cette mission.

Hommage solennel que Turin rend au premier des égyptologues, inventeur de cette science, le seul sur terre à pouvoir faire parler l’Égypte. Pour Champollion « Cadet », en retour, ce sera en quelque sorte son baptême égyptologique. On l’appelle au chevet de ces statues qui ont perdu la parole, il fait don de son intuition, de son savoir, il anime cette collection, étale tout son génie, et grâce à cet échange, nous allons changer d’époque… Nous passons comme pour le 7ème art, de l’ère du « muet » à celle du « parlant ».

 

Cet instantané d’histoire, quasi invisible au milieu des siècles passés animés par toutes sortes d’évènements parfois endiablés, est pour moi l’un des moments les plus tendres, les plus touchants qu’il m’ait été donné de constater. Il fixe dans le temps la rencontre d’une Mère-Patrie et de son fils prodigue et prodige. Si j’osais une image, je dirais qu’Isis tient à nouveau sur ses genoux son fils Horus… Leur ré-union, l’Égypte et Champollion…

Et ce choc qu’il attend, est un avant-goût de ce qui l’attend là-bas, par delà la mare nostrum, au Pays des Deux Terres, il le sait, s’y prépare.

 

Italie, merveilleuse Italie… la Comédie, la Culture, l’Art… depuis déjà un an tu possèdes ta Chaire d’Égyptologie, toi… Voici ce que déclare solennellement l’un de tes Maitres, l’égyptologue piémontais, Silvio Curto :

-« Jean-François Champollion, vous êtes un fils illustre d’Italie et de France. »

Merci pour lui, Maitre… (Entends-tu, mon cher et vieux pays qui se cache là-bas derrière les Alpes ?) Oui, décidément, « il est difficile d’être reconnu et apprécié dans son propre pays ou parmi les siens. » (Jésus Christ)

La Mission peut commencer. Pour se faire, notre découvreur/déchiffreur sera secondé par quelques unes des plus hautes autorités scientifiques et académiques italiennes : Messieurs Peyron, helléniste ; Gazzera, orientaliste ; Piana, astronome ; Micheletti, mathématicien ; Boucheron, latiniste.

 

Voilà tout est en place… Nous sommes le 9 juin 1824. Le déchiffreur est-il anxieux au moment de pénétrer dans ce palais du XVIIème siècle qui abrite l’Académie des Sciences et où il va dans quelques secondes se trouver face à face avec sa Mère Égypte ?

Dès l’entrée dans la salle, en effet, ce fut le choc tant attendu, tant redouté, tant espéré aussi… « Questo e cosa stupenda ! » (Cette chose merveilleuse ! s’écria J.F.C.)

« À la vue de mon Monde, je sentis à l’instant même un contact violent, physique… Mon corps tout entier fut parcouru par mille tremblements, mon âme se désintégrait, mon mental d’airain fondait comme neige au soleil de RÂ. Je ne m’appartenais plus, comme si un passé lointain ressurgissait… j’étais littéralement foudroyé, tétanisé. Elle était là, devant moi, enfin… Un million de dessins, un million de gravures ne m’en avaient préparé en rien. Je vois mon monde… Je le touche, je le sens, il me teste, m’observe… Et dire que ce que je vois là devant moi n’est rien d’autre qu’une vision furtive de sa grandeur, de sa beauté...

Un peu d’eau du Nil s’échappe maintenant de mes yeux. Ces larmes s’écoulent lentement sur mes joues, puis comme deux petits ruisseaux, s’en vont rejoindre la Mère. » 

 

Mais le génie qu’il est se reprend vite. Il essuie délicatement son émotion d’un coin de son mouchoir en soie, puis refoule au plus profond de son être toute l’éruption des siècles silencieux qui a ressurgi. Pour peu il s’excuserait de ce moment d’abandon. Excès de pudeur face à La Lueur… La dignité plus forte que la félicité…

Son regard de feu embrasse d’une seule flamme la salle où repose désormais les monceaux d’Égypte. Il voit ce travail qui incombe à un fils… Il est le déchiffreur, non ?

 

Colosses, statues, statuettes, amulettes, papyrus entiers, en morceaux, en miettes, en poussières…

 

Oui, nous sommes en Italie, ancien empire Romain, peut-être le plus puissant de tous, et c’est lui qui honore aujourd’hui son ancienne et prestigieuse conquête… Il demande au premier des égyptologues de redonner vie à ce mystère.

« Telle est ta tâche, Citoyen Champollion. Rome, par la volonté du peuple et du Sénat veut entendre maintenant et tout de suite la voix de l’ancienne Égypte... »

(Il me semble qu’aucun envahisseur n’adopta les us et coutumes du pays envahi excepté pour l’Égypte et en moins « étincelant » pour la Gaule. Ici, quel que fut l’envahisseur, de Cambyse à Darius, d’Alexandre le Grand aux Empereurs romains, sans oublier le général Buonaparte et sa controversée campagne, aucun n’a pu ou n’a su résister aux charmes, à la magie, aux mystères de cette Civilisation que j’écris avec un grand C, c’est bien le minimum… Tous, ont été « hypnotisés » allant jusqu’à faire inscrire leurs noms à l’intérieur des cartouches réservés aux seuls Rois et aux seuls Dieux du Pays des Deux Terres… Divinisés ? Pharaonisés ? Immortalisés ?)

                                                                                                   Suite page 2

MISSION CHAMPOLLION

 



Par Patrick Kararsi

  

   

Statue de Bartholdi – Collège de France .   « Je veux consacrer ma vie à l’antique Egypte. » JF Champollion. Statue de Bartholdi – Collège de France . « Je veux consacrer ma vie à l’antique Egypte. » JF Champollion .
JFC par Mauzaisse 1830 (Copie, don de Mr Hervé Champollion) JFC par Mauzaisse 1830 (Copie, don de Mr Hervé Champollion)
JFC par Rougé JFC par Rougé
JFC par Étex JFC par Étex
JFC à l'IFAO au Caire JFC à l'IFAO au Caire
JFC JFC
JFC par Mme de Rumilly 1823 JFC par Mme de Rumilly 1823
JFC par Angelelli 1836 JFC par Angelelli 1836
Hermine Hartleben 1ère biographe de JFC 1906 (Don de Mr Martin Hartleben) Hermine Hartleben 1ère biographe de JFC 1906 (Don de Mr Martin Hartleben)
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