"Baptême de Jean-François le 23 décembre 1790 à Notre-Dame du Puy. Sont présents, vicaire Bousquet, Jacques-Joseph tenant Jean-François, le père Jacques et la tante Dorothée Gualieu."
En ce temps là…
À peine disparaissait le dernier rayon du soleil de Louis que poignait déjà à l’horizon une aube nouvelle qui allait “révolutionner“ la France. Dans le bel âtre de feu ce royaume, cendré au dedans doré au dehors, allait bientôt y jaillir de puissantes “Lumières“.
Si, le ci-devant Dieudonné Bourbon, après avoir fait ouvrir les volets de son château de Versailles avait daigné regarder au-delà des jets de ses bassins, voici ce que sa Majesté aurait pu constater de son peuple :
"des animaux noirs entrant dans leurs tanières la nuit“. La phrase est de La Bruyère. Tristes cires…
Durant près d’un siècle, de 1650 à 1750, le chiffre de la population française restera stable, autour de vingt millions d’individus, dont quatre-vingt pour cent au moins de ces royaux sujets (animaux noirs) demeuraient dans nos campagnes. Ce premier état “d’âmes“ qui sera validé bien plus tard par l’éminent Pierre Goubert (1) fut établi en son époque par Monsieur le Maréchal de Vauban alors qu’il tentait grâce à sa grande réforme fiscale d’endiguer les difficultés économiques et sociales qui empoisonnaient le royaume (trois millions de morts de faim aux hivers 1692/1693/1694). Pour se faire, il procéda à un sondage, en somme, au premier véritable recensement (d’autres systématique viendront bientôt institués, par Napoléon Bonaparte)
Que n’avaient-ils point (nos monarques) anticipé la phrase du futur général de Gaulle : L’on ne fait pas de politique en dehors des “ ruralités “ (réalités) !
Cela ne revenait-il pas au même pour l’époque ?
Bref, Dieu ayant repris son âme à Louis le Grand, pourrait-on dire que dès après cet instant la France fut comme… libérée ?
De nouvelles technologies, de nouvelles sciences apparurent comme entre autres, la démographie, la statistique. L’on put constater dès lors qu’entre le début et la fin du XVIIIème siècle, la population passa de vingt millions à vingt-huit millions de Français - un tiers de plus, c’est énorme ! Comme nous l’explique Olivier Coquard (2) dans son ouvrage de référence “La France des Lumières et des révolutions de 1715 à 1815“, cela n’est point dû à quelques améliorations des soins obstétriciens et médicaux - l’on mourait hélas toujours beaucoup en couche et un enfant sur cinq à peine atteignait l’âge de vingt ans, non, cela concerne presque exclusivement la nourriture.
L’on mange tout simplement mieux, plus varié, plus frais, les récoltes s’améliorent, les greniers sont pleins, et de ce fait l’on résiste d’autant plus aux bactéries, aux maladies, aux épidémies.
L’espérance de vie au début du XVIIIème siècle était de vingt-sept/vingt-huit ans. En sa fin, l’on pouvait espérer atteindre les trente-cinq ans, presque dix ans de mieux.
Olivier Coquard nous dit encore que l’on commençait, outre soi-même, à soigner également son habitat, la décoration, le mobilier, sa coquetterie avec la mode, la coiffure. Des infrastructures prenaient corps, facilitant notamment les liaisons plus ponctuelles que dangereuses entre Paris et Limoges en voitures “turgotines“, carrosses 4/8 places tirés par 6/8 chevaux inventées par l’intendant Turgo, et puis les livres garnissaient de plus en plus les bibliothèque (romans, feuilles, pamphlets).
Qu’est-ce, en effet, que la lecture ? C’est un entretien secret où l’esprit parle au cœur : où le génie interroge la raison et l’écoute avec docilité : où la raison fait fructifier les germes du génie. C’est un commerce d’idées et de sentiments entre l’écrivain et le lecteur. Un livre est leur commun truchement. (Essai sur la lecture, Louis Bollioud-Mermet, 1765)
La lecture avait commencé sa révolution !
Enfin, une certaine pax romana régnait à l’intérieur
et alentours de l’hexagone, ce qui eut un impact certain sur ces (r)évolutions.
“Plus de lumière !
GOETHE
(NATIONAL GÉOGRAPHIC une année de bonheur en 365 images et pensée le 22 décembre)
D’Alembert et Diderot inaugurent au cours de cette même seconde moitié de XVIIIème siècle ce que la ville et le monde surnommèrent “Les Lumières“ en leur présentant leur ouvrage: “ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ DES ARTS ET DES MÉTIERS“ dont le premier tome parait à Paris en MDCCLI (1751).
Qu’est-ce que “Les Lumières“ ? Demande t-on à Kant… Voici sa réponse :
“L’homme des Lumières est celui qui sait porter le flambeau de l’avenir et qui sert de guide, de
référence à l’ensemble d’une société, c’est l’espoir
de progrès pour toute l’humanité“.
Et les hiéroglyphes dans tout cela? On “nait“ toujours dans une impasse…
Dans son émouvant ouvrage (mon livre pieux) consacré à la vie et à l’œuvre de Jean-François Champollion paru à Berlin en 1906 sous le titre Jean- François Champollion sein lieben und sein werk, Hermine Hartleben rend compte de témoignages émanant directement de la famille de Jean-François mort soixante-dix ans auparavant, ainsi que d’autres recueillis auprès de Figeacois et de Grenoblois dans les mémoires desquels étaient conservés traces et souvenirs des événements.
Dans le chapitre sur la naissance du futur déchiffreur, l’on y apprend que celle-ci est nimbée de mystère…
En effet, avant d’enfanter miraculeusement lors de sa quarante-neuvième année, ce qui constitue un record pour l’époque, Françoise Galieu-Champollion, vivotait recluse dans la maison de la Boudousquerie, quasi impotente, percluse de rhumatismes à tel point que son mari Jacques Champollion, le libraire de Figeac, dut la confier aux bons soins de Jacquou, “guérisseur“ de son état, grand connaisseur des plantes et de la nature humaine devant l’Éternel !
Entre deux frictions et trois décoctions il fit une drôle de prédiction à l’épousée Champollion : Tu auras un fils qui te fera plaisir… (Que cela soit écrit et accompli) !
Ô miracle, après trois jours de ces soins intensifs et attentifs, Madame Jeanne Galieu- Champollion recouvrait non seulement santé mais, quelques neuf mois plus tard, la prédiction se réalisait bien car naquit ce fils prodige dans la nuit du vingt-trois décembre 1790. Remuant, criant, teint jaune, œil noir, cheveu noir. Sur ses frêles épaules il portait déjà l’espoir… mais lequel ?
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