Lumineux-Champollion
  Lumineux-Champollion

(H.C.)

-Figurez-vous qu’en sortant de chez mon client, je tombe nez à nez avec un ami… Le Sieur  Vidocq…

(B.A.B.)

-Le grand policier ?

(H.C.)

-L’IMMENSE POLICIER, oui… (Dit Maître Castel sur un ton qui n’admettait point de réplique)…

Je ne l’avais revu qu’une fois depuis son départ de la rue de Jérusalem…

Toujours aussi fière allure le gaillard… Dommage… J’étais réellement désolé de n’avoir pas de temps à lui consacrer aujourd’hui. Si j’ai bonne mémoire, la dernière fois que nous nous étions rencontrés, c’était pour la fameuse embuscade qui m’avait été tendue chez un client rue Saint-Maur-Popincourt… Suite à un renseignement donné par mon cher Charles qui débutait à mon service, il avait eu en effet ce jour là, comme à son habitude d’ailleurs, l’idée d’aller en « repérage » car il aime la précision ce petit… Bref, des cris dans une habitation, celle-là même où je devais me rendre l’après-midi, des noms d’oiseaux qui fusent, mon nom, des menaces… Charles prévint alors illico Madame Malo qui m’avertit toute     tremblante… Je fis mander Vidocq qui tient sa boutique d’enquêteur privé au 13 de la Galerie Vivienne, anciennement Galerie « Marchoux », construite en 1823 et inaugurée en 1826, du nom de l’un de nos vénérables  Présidents de la Chambre de notaires qui la fit bâtir. Il se présenta donc au rendez-vous en ayant eu soin de placer dans les environs ses hommes. Il frappa, annonça « Maître Castel »… On l’introduit puis le menaçait d’un       pistolet… Il reconnut immédiatement la voix         mauvaise. Alors au moment où il appela ce         « fripon » par son nom et énuméra tous ses méfaits, profitant de la surprise, il assomma les deux       goujats… Le meilleur policier de France, je vous dis, le MEI-LLEUR… Enfin, n’en parlons plus…

 

Une fois recouvré sa sérénité, il interpela son voisin :

-Dites-moi cher collègue, avez-vous conscience de ce que nous allons réaliser aujourd’hui ?

Nous nous apprêtons à ensevelir, DÉ-FI-NI-TI-VE-MENT, vous et moi, l’un des plus Grands Hommes qui eut existé…

Nous allons réduire sa vie, celle d’un Égyptien qu’il était, à quelques valeurs matérielles sinon vaines, pour le moins ineptes, très « terre à terre »,     palpables, négociables. Un quotidien changé en de menues poussières dorées qui disparaîtront au       premier coup de vent venu… Et cela m’attriste… Pis, cela déprime chaque partie de mon corps, de mon âme… Est-ce possible pareille chose ? C’est pourtant   ainsi que je le ressens.

 

La rue Neuve-des-Petits-Champs est déserte… La calèche passe maintenant devant l’étude où Maître Castel officie, au numéro 61… Il adresse un mot à la concierge qui balaie…

-Bien le bonjour Madame Denise…Alors, toujours ce sable ?

(Madame Denise-Arletty ALOZ, concierge de l’immeuble sis 61 rue Neuve-des-Petits-Champs)

-Bonjour M’sieur Castel… Z’avez vu ça ? C’est à n’y rien entraver (comprendre)… Rien que devant cet’étude là, du sable doré… Ça  fait un p’tit moment qu’ça dur. Va falloir agir que j’vous dis… signifia t-elle, les poings posés sur les hanches…

(H.C.)

-Bon courage alors!

Hippolyte Castel n’eut pas terminé sa phrase que le commissaire-priseur l’interrompit.

(B.A.B.)

-Alors, vo…vous aussi ?

(H.C.)

-Moi aussi quoi ? Cher confrère…

(B.A.B.)

-Vous avez du sable devant chez vous ?

(H.C.)

-Ben… oui…

(B.A.B.)

-Étrange, ne trouvez-vous pas ? Du sable, devant le   11 Choiseul, devant le 61 des Petits-Champs…       Quelqu’un vous en veut, et à moi aussi… Mais qui ? Et pourquoi du sable ?

 

Hippolyte Castel pris une grosse inspiration et d’une voix parfaitement calme répondit :

-Croyez-vous aux messages émanant « d’ailleurs » ? (Hippolyte pointa son index en direction du ciel)     Croyez-vous aux signes, aux mystères, mon cher confrère ?

Benoît-Antoine regarda son voisin l’air interloqué…

-En voilà une question… Vous m’inquiétez mon ami… Vous feriez bien de mettre votre chapeau, dit-il d’un air goguenard tout en regardant le ciel… Moi aussi d’ailleurs car je crains fort que le Dieu Râ nous estourbisse un peu... (Il souriait de son bon mot)…

Hippolyte, lui semblait être « parti » dans un       ailleurs, aussi loin que ses pensées se laissèrent attirer, aspirer… Il réfléchissait à la vie de ce Jean-François Champollion, à l’Égypte, civilisation unique dont il rêvait souvent ces derniers temps.  Jean-François Champollion… Quel incroyable personnage… Un génie ? Oui… un Génie…Réussir à comprendre, à lire ces fameux hiéroglyphes… Je me suis essayé, moi à cette science nouvelle… J’ai suivi ses méthodes, ses indications… Et s’il est des esprits « forts », il en est également de « supérieurs »… Voici ma         conclusion… Lui, il était non seulement               « supérieur», mais de plus il était « égyptien » !     Pour sûr ! « C’est un système complexe, une écriture tout à la fois figurative, symbolique, et phonétique, dans un même texte, une même phrase, je dirais presque dans un même mot. » Voilà ce qu’il a dit de son Égypte,  puis il est parti… 

Subitement, il déclama : « L’étendue de l’esprit, la   force de l’imagination, et l’activité de l’âme. Voilà le génie. »

(B.A.B.)

-Bravo mon cher…

(H.C.)

-Ô Grand Dieu, cela n’est pas de moi… Cela est du Grand Denis Diderot…

(B.A.B.)

-Hippolyte, faut que je vous dise…

(H.C.)

-Oui, je vous écoute…

(B.A.B.)

-Je ne sais pas en ce qui vous concerne, mais moi, depuis que nous sommes en charge de cette succession Champollion, mes nuits sont « agitées »… Enfin,     d’après ce qu’en dit mon épouse…

Je me tourne, me retourne, crie, hurle… Pas un mot de compréhensible… J’ai chaud, j’ai soif, j’ai froid… Le plus terrible est qu’aucun souvenir ne me reste au matin… Sauf… Cette boule au ventre et       éventuellement un bon mal de tête…

Aux commissures des lèvres du visage d’Hippolyte   apparut un léger sourire…

Il répondit :

-Alors mon ami, bienvenue dans ce « club »…

(B.A.B.)

-Mais, de quel club parlez-vous ?

(H.C.)

-Un peu de patience, que diantre… Vous comprendrez tout à l’heure, dit-il sur un ton empreint de résignation… Sachez que ma femme également me trouve un peu, comment dire ?  Bizarre…

(B.A.B.)

-Bizarre… Bizarre ?

(H.C.)

-Oui mon cher, j’ai bien dit « bizarre »…

Hippolyte ferma les yeux, inspira profondément…Devant certaines boutiques l’on arrosait les         trottoirs à grands coups de seaux d’eau pour fixer   la poussière d’une activité humaine réduite en cette période… L’odeur des pavés brûlants et trempés à la fois n’était point désagréable et faisait voyager son esprit…

Charles tira à peine sur les rênes pour indiquer à Marengo de virer à droite rue Gaillon.

                                            Suite page 4

MISSION CHAMPOLLION

 



Par Patrick Kararsi

  

   

Statue de Bartholdi – Collège de France .   « Je veux consacrer ma vie à l’antique Egypte. » JF Champollion. Statue de Bartholdi – Collège de France . « Je veux consacrer ma vie à l’antique Egypte. » JF Champollion .
JFC par Mauzaisse 1830 (Copie, don de Mr Hervé Champollion) JFC par Mauzaisse 1830 (Copie, don de Mr Hervé Champollion)
JFC par Rougé JFC par Rougé
JFC par Étex JFC par Étex
JFC à l'IFAO au Caire JFC à l'IFAO au Caire
JFC JFC
JFC par Mme de Rumilly 1823 JFC par Mme de Rumilly 1823
JFC par Angelelli 1836 JFC par Angelelli 1836
Hermine Hartleben 1ère biographe de JFC 1906 (Don de Mr Martin Hartleben) Hermine Hartleben 1ère biographe de JFC 1906 (Don de Mr Martin Hartleben)
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